Didier Lapeyronnie : "quartiers d'exil"

Publié le par oldtime

Didier Lapeyronnie est professeur de sociologie,  après avoir travaillé sur l'histoire syndicale et politique du monde ouvrier, il s'est spécialisé dans la compréhension ou l'étude des banlieues ,ce qu'il appelle "les quartiers d'exil ! ".  Il constate depuis une vingtaine d'années un repli de ces périphéries urbaines sur elle -mêmes : des banlieues , on passerait progressivement à la notion de Ghetto . Avant des projets étaient menés vers l ' extérieur. C'est un monde ambivalent, on se protège vis  à vis de l'extérieur, mais on souhaiterait y participer !

Un langage  de l'ambivalence

Ce qui est une situation profondément handicapante sur le plan social. Cela se manifeste de trois façon : 1) Le langage est lui même ambivalent ; tout devient fictif, rien  n'est vrai ou faux ! 2) On n'est pas reéllement responsable de ses actes, l'identication à la délinquance est insupportable 3) Les événements se vivent sur le mode théâtral : Un coup de feu est tiré , il peut y voir des blessés ou des morts, c'est la malchance, le hasard ! Tous ces éléments "culturels" ont été mis en avant aux Etat-unis dans les années 60 dans l'ouvrage d' Eliott Liebow "Tallys' Corner" qui s'intéressait aux Ghettos noirs. Quant à la domination sociale et économique des hommes, elle les met en situation de faiblesse sur le marché matrimonial, l'accès aux femmes se ferait rare !

Trop de puritanisme !

L'autre caractéristique soulevée par le sociologue est le puritanisme ambiant ! Ce phénomène culturel favoriserait une expression masculine  projective de la sexualité : la pornographie ! Quant à la femme  sa féminité  serait paraxodalement manifestée comme extravertie, mais elle perd alors une capacité à se protéger ! Bref, plus qu'ailleurs les relations hommes -femmes seraient difficiles ! Le ghetto c'est aussi le phénomène de "l'embrouille", des petits incidents provoquent rapidement des conflits irréductibles . Tout le monde se connaît, et l'on prend parti, pour l'un ou l'autre camp ! Contrairement à la communauté qui se construit autour de valeurs communes, le ghetto n'a pas de réelle culture commune !  

Trop de famille !

Et contrairement à l'idée la plus commune, les enfants  ne souffrent pas tant d'un déficit familial qu'un trop plein de celle-ci, liée notamment  à l'histoire de l'immigration chargée de tous les espoirs et donc dans le même temps de tous les désespoirs ! La "culture "de rue est donc une production de cette ambivalence : trop de famille et rejet des institutions  non intégrantes !  D'où pour D. L  les trois piliers de la rue : 1) Les institutions  (écoles, centres sociaux ...) qui seraient de plus en plus rejetées faute de remplir leur rôle d'accès à une intégration réussie. 2) Le néocommunautarisme ( retour à la tradition : ,le bled , la mosquée ...) 3) Les trafics illicites en tout genre.... Ces trois systèmes mouvants sont le résultat d'absence de repère politique, du désert de celui-ci. A cet égard D. L perçoit  les évènements de l'automne dernier  en France comme une avancée progressive du désert politique, une sécheresse qui condamne à la régression vers le Ghetto.et à la réprobation morale et non pas à une lecture plus politique comme dans les autres pays européens.  Bref, Il y aurait encore un espace non négligeable pour lutter contre le désert ...

( lire : Entretien de D. P au journal :  la Croix du 3 février 2006 +  "Les quartiers d'exil" )

 

Publié dans sciences humaines

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